Chroniques Livres

Idiss de Robert Badinter

Chez Fayard, Octobre 2018, 226 pages.
Ma note : 4/5

Quatrième de couverture :
J’ai écrit ce livre en hommage à ma grand-mère maternelle, Idiss. Il ne prétend être ni une biographie, ni une étude de la condition des immigrés juifs de l’Empire russe venus à Paris avant 1914. Il est simplement le récit d’une destinée singulière à laquelle j’ai souvent rêvé. Puisse-t-il être aussi, au-delà du temps écoulé, un témoignage d’amour de son petit-fils.

Mon avis :
Je remercie les éditions Fayard et Netgalley France pour la lecture de cet ouvrage.

Première lecture d’un livre de Robert Badinter pour moi et cela a été une excellente surprise. J’avoue l’avoir demandé parce qu’il était en top des ventes, que beaucoup de clients me le réclamaient et que la curiosité l’a emportée. Cela a finalement été un excellent moment de lecture parce que l’écriture de Robert Badinter est extrêmement fluide, accessible et agréable et cela m’a permis de me plonger entièrement dans le récit de la vie de sa grand-mère. Cela me conforte dans l’idée de m’intéresser de plus en plus à des récits de ce type, à des témoignages et à sortir de ma zone de confort.

Idiss est une femme que l’on découvre petit à petit au fil des pages. Née en 1863, originaire de Bessarabie, un pays situé anciennement près de la Roumanie et décimé par la Shoah, elle se retrouve soudainement déracinée. Elle va perdre tous ses repères, devoir changer de vie, ses habitudes. Sa famille va d’abord déménager pour tenter de se reconstruire une vie à Paris et tenter de lancer une entreprise dans le textile, à partir de rien. Pour ensuite lui demander de la rejoindre, même si la barrière de la langue restera un gros handicap pour Idiss. C’est personnage à part entière, une femme qui a dû se reconstruire quand on l’a arrachée à son pays. Idiss a donc vécu une vie difficile, pleine de rebondissements que l’on découvre au fil des chapitres. Son histoire personnelle a été marquée par l’histoire globale, les migrations, l’antisémitisme, la violence, le nazisme de la seconde guerre mondiale, l’extermination des juifs…

Un témoignage qui rend hommage à cette femme avec beaucoup de pudeur et de respect. Une lecture très émouvante que je recommande vivement !

Chroniques Livres

Sur ordre de Dieu de Jon Krakauer

Chez les Presses de la Cité, Septembre 2018, 475 pages.
Ma note : ★★

Quatrième de couverture :
Utah. Une petite ville plantée dans le sillage de Salt Lake City, le fief de l’Église mormone. Le 24 juillet 1984, Allen Lafferty, mormon pratiquant, rentre chez lui après sa journée de travail, dans la maison qu’il habite avec sa jeune épouse et leur bébé de quinze mois. Quand il pousse la porte, l’horreur l’attend : Brenda et sa petite fille ont été sauvagement égorgées. En un instant, Allen est convaincu qu’il connaît les coupables. Et pour cause, ce sont ses frères.
À la barre des mois plus tard, Ron et Dan Lafferty ne nieront pas les faits. Pas plus qu’ils n’exprimeront le moindre remords. Les deux Lafferty sont des prophètes, Dieu parle à travers eux, il leur chuchote ses ordres. Pour eux, l’État n’existe pas. L’école ? Une machination. La médecine ? Un charlatanisme. Ron et Dan Lafferty ont quitté le giron des mormons pour embrasser une foi chrétienne radicale, dont l’un des piliers n’est autre que la polygamie. Et Brenda Lafferty avait commis l’erreur d’y être opposée…
Revenant sur les grandes heures de la fondation de la religion mormone et l’épineux dossier des sectes transfuges qu’elle a fait naître dans ses rangs, le maître de la narrative non fiction interroge les ressorts du fanatisme religieux et exhume l’une des affaires criminelles les plus retentissantes de l’histoire américaine des dernières décennies.

Mon avis :
Je remercie les éditions Les Presses de la Cité et Netgalley France qui m’ont permis cette lecture. Je me suis penchée sur ce nouvel ouvrage de Jon Krakauer en gardant un excellent souvenir de ma lecture de Into the Wild, qui avait été un coup de cœur à l’époque et dont l’adaptation reste un de mes films préférés aujourd’hui. La lecture de Sur ordre de Dieu a pourtant été en demi-teinte et même si elle m’a appris énormément de choses sur la communauté mormone, elle ne s’est pas avérée aussi exceptionnelle que Into the Wild.

Ce livre, qui combine les codes d’un essai, d’un témoignage et d’un récit, nous relate tout d’abord un fait divers, celui de la famille Lafferty. Alors que Allen rentre chez lui après une journée de travail, il découvre le corps de sa femme et de sa petite fille de quinze mois, toutes les deux mortes dans des conditions assez violentes. L’enquête révélera que c’est en fait les frères d’Allen qui sont les responsables, et que celui qui a porté les coups de couteau a été « guidé par Dieu ». C’est sur ce fait que débute le livre, nous relatant alors d’autres faits et récits du même acabit ailleurs aux Etats-Unis, tout en revenant régulièrement à ce point de départ.

Sur ordre de Dieu a le mérite de nous faire découvrir les fondements de la religion mormone qui compte près de 13 millions de membre dans le monde. Tout au long de son ouvrage, Jon Krakauer va s’intéresser à la violence religieuse et à l’extrémisme dans la religion mormone. La vision donnée des mormons demeure assez négative, puisqu’elle est associée à la violence tout au long du livre, et Jon Krakauer s’intéresse longuement au mariage plural, quelque chose qui est très éloigné de mes idéaux et j’ai eu du mal à adhérer aux témoignages. Cependant même si la religion mormone est une religion patriarcale fermement enracinée dans les traditions de l’ancien testament, aucun jugement personnel n’est émis, Jon Krakauer ne fait d’émettre des faits, relater et retranscrire des événements d’enquête ou des procédures judiciaires, citer des textes de références afin de tenter de comprendre ce qui a pu pousser à ces choix et ces comportements.

Je pense tout simplement que je ne suis pas assez familière avec le genre et que je m’attendais à autre chose en attaquant la lecture, à quelque chose de plus rythmé et de moins factuel. Les nombreuses citations et références à d’autres récits et textes m’ont beaucoup ralentie pendant ma lecture et j’ai ressenti de nombreuses longueurs. Les références à la religion mormone m’ont cependant énormément intéressée et je pense réellement que cet ouvrage pourra en intéresser beaucoup parmi vous, d’autant plus que Jon Krakauer à une écriture très facile d’accès et les chapitres courts permettent réellement de ne pas se perdre et de garder le fil des événements relatés. Cet ouvrage n’était donc pas totalement pour moi, mais je suis ravie de l’avoir lu et d’en ressortir avec des connaissances supplémentaires.

Chroniques Livres

Marion, 13 ans pour toujours de Nora Fraisse

Chez Le Livre de Poche, novembre 2015.
192 pages, 6€30.
Ma note : ★★★★☆

Quatrième de couverture :
Marion, ma fille, le 13 février 2013, tu t’es suicidée à 13 ans, en te pendant à un foulard, dans ta chambre. Sous ton lit en hauteur, on a trouvé ton téléphone portable, attaché au bout d’un fil, pendu lui aussi pour couper symboliquement la parole à ceux qui, au collège, te torturaient à coups d’insultes et de menaces. J’écris ce livre pour te rendre hommage, pour dire ma nostalgie d’un futur que tu ne partageras pas avec moi, avec nous. J’écris ce livre pour que chacun tire les leçons de ta mort. Pour que les parents évitent à leurs enfants de devenir des victimes, comme toi, ou des bourreaux, comme ceux qui t’ont fait perdre pied. Pour que les administrations scolaires s’évertuent à la vigilance, à l’écoute et à la bienveillance à l’égard des enfants en souffrance. J’écris ce livre pour qu’on prenne au sérieux le phénomène du harcèlement scolaire. J’écris ce livre pour que plus jamais un enfant n’ait envie de pendre son téléphone, ni de suspendre à jamais sa vie.

Mon avis :
Il est toujours difficile de noter un témoignage et encore plus quand il aborde un sujet aussi délicat que Marion, 13 ans pour toujours. Ici, Nora Fraisse nous présente sa fille aînée, Marion, qui s’est suicidée un mercredi dans sa chambre après être rentrée plus tôt du collège parce qu’elle ne se sentait pas bien. Après enquête de la part de la police et surtout de la part de ses parents, le verdict tombe : Marion était victime de harcèlement. Ses amis s’étaient retournés contre elle et avaient rejoint la bande qui s’en prenaient à elle. Elle n’avait plus personne, avait décidé de rompre avec son petit copain pour qu’ils ne lui fassent pas la même chose. Les insultes, les coups… Marion a subit toutes ces choses en silence. Personne ne l’a signalé à ses proches. L’histoire de Marion est vraiment tragique et m’a brisé le cœur parce que je me suis presque reconnue dans certaines descriptions que faisait sa mère. Le collège est une période ingrate et difficile dont on ne sort que rarement indemne.

Ce qui est relaté dans ce livre, c’est principalement le silence. De la part de Marion comme de l’administration, personne n’a signalé le changement de comportement ou les nombreuses disputes qui éclataient au collège à ses parents. Le suicide de Marion n’est pas sans conséquences pour ses parents, qui bien sûr se sentent coupables, cherchent une explication, ne comprennent pas ce qui l’a poussée à aller jusqu’à mourir. Mourir pour ne plus souffrir.

Le silence de l’administration et la façon dont la mort de Marion a été manipulée par les médias sont les deux choses qui m’ont le plus choquée, avec l’acte de la jeune fille. Le collège n’a même pas présenté ses condoléances à sa famille, le principal a refusé de reconnaître qu’ils avaient peut-être une responsabilité dans sa mort, qu’ils auraient dû faire quelque chose, voir quelque chose. Les médias, qui parle de Marion, son caractère, la lettre qu’elle a laissé à sa mort sans même demander leur accord à ses parents… C’est comme si elle n’avait pas le droit de garder son image, tout est utilisé.
La seule chose qui m’ait un peu déçue dans ce livre, c’est que Nora Fraisse s’est engagée depuis à lutter contre le harcèlement scolaire avec une fondation, mais elle n’en parle pas beaucoup ici. J’imagine qu’elle en parle plus dans son autre livre Stop au harcèlement !, mais j’aurais aimé savoir un peu quelles étaient les actions ou les idées de l’association Marion la main tendue. Le harcèlement scolaire est un sujet dont on parle de plus en plus, je pense que c’est important et bien, même si cela dure depuis toujours et que l’on n’en parle que maintenant. Mieux vaut tard que jamais. Si des livres comme celui-ci peuvent aider des parents, des enfants et élèves qui font souffrir ou qui eux-même souffrent, ou des personnes travaillant dans le milieu scolaire à gérer la situation autrement, c’est une bonne chose.

Chroniques Livres

Un chat médium nommé Oscar de David Dosa

Chez Archipoche, février 2014.
280 pages, 6€65.
Ma note : ★★★☆☆

Résumé :
Au Steere House de Providence (Rhode Island), centre qui accueille des patients atteints des maladies d’Alzheimer et de Parkinson, les infirmiers et les médecins ont remarqué qu’Oscar effectue des rondes, et se couche auprès des mourants quelques heures à peine avant leur décès. Si cet étrange don a donné lieu à une nouvelle procédure (l’équipe médicale prévient la famille dès qu’Oscar s’allonge au côté d’un malade), il a également suscité le débat chez les scientifiques.
Le chat serait-il en effet capable d’identifier l’odeur spécifique de la mort ou serait-il sensible aux infimes modifications physiologiques précédant le décès ? Quoi qu’il en soit, vingt-cinq cas ont été avérés en trois ans. Et l’hôpital a tenu à remercier le félin en faisant graver cette plaque, apposée dans le hall : « Un grand merci à Oscar le chat pour son aide compatissante. »

Mon avis :
J’avais vaguement entendu parler de cette histoire, je crois que c’était aux informations ou dans un journal, colonne faits divers. Un chat qui venait accompagner les personnages âgées lors de leurs derniers moments, qui s’allongeait près d’eux et leur tenait compagnie jusqu’à leur décès. Il ne s’était jamais trompé.
J’ai donc commencé ce témoignage en sachant de quoi il allait parler, mais j’ai quand même été surprise. Oscar, ce chat, n’est finalement qu’un prétexte pour parler de Steere House et de la condition de fin de vie des personnes âgées, des soins palliatifs et de cette fameuse maladie qu’est la démence et dont la plus connue est Alzheimer. Le médecin et auteur, David Dosa, est d’abord très sceptique dans l’infirmière en chef lui parle de ce chat qui semble deviner quels patients vont décéder et qui se couche sur leur lit dans les derniers jours de leur vie. Ce médecin, c’est un peu comme le lecteur : on a tendance à ne pas vouloir croire à une telle histoire. Un chat, ça peut faire des tas de choses qu’on ne comprend pas, et décider aller à tel endroit à tel moment peut être un pur hasard. Mais les coïncidences sont nombreuses et il décide de contacter les familles d’anciens patients pour connaître leur avis. Et ça ne trompe pas : Oscar était présent à chaque décès, et leur a apporté réconfort et de la compagnie.

Finalement, ce témoignage qui est presque construit comme un roman (si vous n’aimez pas les témoignages, laissez vous quand même tenter !) ne parle pas tellement d’Oscar le chat, puisque l’on ne sait pas grand chose de lui, mais beaucoup plus de l’aspect médical et des patients, des familles et des soins. On en apprend énormément sur la démence et toutes les sous maladies qui existent, les symptômes, les traitements de fin de vie… C’est un témoignage plutôt instructif. Si vous voulez une histoire toute mignonne sur un chat tout gentil, ce n’est pas vraiment ce livre que je vous recommanderais… J’ai d’ailleurs trouvé certains passages plutôt longuets et pas forcément utiles, mais la plume de David Dosa rend le tout très facile à lire. Je suis loin du coup de cœur, mais je suis contente de l’avoir lu et d’avoir appris certaines choses.

Chroniques Livres

Docteur Fourrure de Sylvain Balteau

Publié chez Les Arènes, avril 2015.
245 pages, 19€90.
Note : ★★★☆☆
Résumé :
Le métier de vétérinaire est un roman : les joies et les drames de la vie s’y jouent et s’y dénouent.
Installé au pied des Pyrénées, Sylvain Balteau soigne des chiens et des chats, mais aussi des vaches ou des ânes. Il nous raconte le théâtre vivant de ses journées : le porcelet devenu la raison de vivre d’un marginal, le papy venu la veille de Noël pour le dernier sommeil de son vieux chat et reparti avec un animal en pleine forme, la jument qui s’éteint doucement sous un arbre, le hamster qu’une fillette de 6 ans vient faire soigner à l’insu de ses parents…
Il n y a pas d’heure pour un vétérinaire. À 2 heures du matin, il se rend, sans discuter, dans une cour de ferme. Il n’y a pas non plus de limites à l’absurde et à l’émotion dans les histoires qu’il raconte, toutes véridiques et parfois drolatiques.
Il faut bien sûr aimer les animaux pour exercer ce métier. Mais il faut aussi beaucoup aimer ses semblables pour être ce Docteur Fourrure-là, avec son humanité à fleur de peau et sa formidable écriture.
Mon avis :
Passionnée par les animaux depuis que je suis petite (j’avais même eu pour projet de devenir vétérinaire en primaire) alors forcément, quand nous sommes allées chez Carrefour avec ma mère et qu’elle m’a montré ce livre de témoignage d’un vétérinaire, je n’ai pas pu résister. Je suis du genre à regarder 30 millions d’amis dès que je peux, tous les reportages sur le métier qui passent à la télévision. Du coup, je l’ai acheté malgré le prix bien trop élevé à mon goût.
J’ai, globalement, aimé ma lecture, mais je suis loin de la lecture coup de cœur à laquelle je m’attendais. J’ai eu du mal à m’attacher à ce véto, ce docteur Fourrure. Certains chapitres étaient très touchants, d’autres plutôt drôles… Mais au bout d’une petite dizaine de chapitres (parce que les chapitres sont très courts et cela s’enchaîne plutôt rapidement), j’ai commencé à me lasser, et j’ai eu du mal à rester plongée dans ma lecture jusqu’à la fin. Je trouve que le métier de vétérinaire est un métier merveilleux, j’ai un profond respect pour les gens qui l’exercent mais bizarrement, je n’ai pas réussi à ressentir cette passion lors de cette lecture. J’ai appris quelques petites choses, mais dans l’ensemble, j’ai été plutôt déçue. J’ai trouvé que le ton général de ce témoignage était plutôt triste, alors que je m’attendais à voir plus de chapitres un peu drôles et loufoques. Ça parle quand même beaucoup de mort, et d’euthanasie, et même si cela fait parti de la vie d’un vétérinaire ce n’était franchement pas joyeux à lire. Il y a également beaucoup de chapitres sur les vêlages et bien que ce soit intéressant, j’ai trouvé qu’on en parlait un peu trop, c’était un peu répétitif… Sans doute parce que leur métier de véto l’est aussi, quelque part.
En tout cas, je ne regrette pas ma lecture, mais j’en sors quand même légèrement déçue. Ce n’est pas vraiment ce à quoi je m’attendais, je regrette le prix également parce que 19€ c’est quand même extrêmement cher…